Soirée agitée. - BYO

Plus pressé qu'autre chose d'en finir rapidement avec cet énergumène qui trottinait à ses côtés, Byo se dit que, finalement même s'il courait, les heures ne passeraient guère plus rapidement. Agacé, il ralentit sa marche, soupira doucement et leva les yeux au ciel, dépité. Quelle folie l'avait pris d'accepter la proposition de Miyavi ? En fait, même s'il ne voulait pas l'avouer, c'était sûrement parce que, contrairement au propriétaire de Maboroshi, lui il n'avait encore rien fait d'extraordinaire dans sa vie. Peut-être l'enviait-il, ou le jalousait-il.

- Ton patron m'a proposé un job. Et quant au fait d'être un host, nous sommes tous bien d'accord sur ce point, répondit-il finalement à son interlocuteur.

Ils traversèrent une ruelle, tournèrent au coin d'une seconde pour voir se dessiner un bar devant eux. Le blond sourit, ce bar il l'aimait beaucoup - il avait même voulu bosser ici, mais il n'y fut pas pris - car les boissons n'étaient pas très chères, mais pourtant extrêmement bonnes.
Il fit un signe de la tête à Kanon pour lui dire qu'ils iraient boire un verre ici.

- Monsieur Kanon, ce bar vous plait-il ? rit-il.

En réalité, il grinçait en son for intérieur. Il prenait grandement sa colère et son envie de le frapper sur lui. Il n'avait jamais fait cela auparavant et son effort lui pompait énormément d'énergie. Un délicieux petit alcool l'aiderait très certainement à digérer ce qu'il devait faire.

Lorsqu'ils entrèrent dans l'établissement, Byo fit un signe de la main au patron qu'il connaissait plus ou moins. Les deux nouveaux arrivants s'installèrent à une table dans le fond de la pièce, là où personne ne pourrait venir les ennuyer.
A la question du brun, le blond releva le visage et planta son regard dans le sien.

- Tu m'exaspères, déclara-t-il, tu es tout le temps comme ça ? Je veux dire, chiant ? Et ouais, je vais pouvoir tenir au Maboroshi si Miyavi m’embauche, continua-t-il, sache que si je veux quelque chose, je l'ai et je fais ensuite de mon mieux pour la conserver.

Il retira sa veste, la mit sur le dossier de sa chaise puis croisa les bras sur sa poitrine. Il observa son interlocuteur en se demandant bien ce qu'il avait de plus que les autres hosts pour être apparemment si sollicité que ça. Une belle gueule ? Certes, mais lors de son cours séjour au Maboroshi, Byo avait croisé, dans les couloirs, d'aussi beaux étalons. Kanon devait posséder quelque chose d'autre qu'il ne parvenait décidément pas à relever.
Le blond aperçut un serveur non loin d'eux, il l'interpela et l'homme vint à la table.

- Choisis ce qu'il te fait plaisir, apostropha-t-il Kanon, je prendrais la même chose que lui, dit-il à l'adresse du serveur.

Il sourit légèrement, si Kanon ne voulait pas de bière qu'il déclarait être pour les pauvres, quelle boisson buvait-il ? Byo souhaitait connaître un minimum les goûts de l'host, ainsi, si son entretien s'avère satisfaisant, il pourrait à son tour proposer de bonnes boissons à ses futurs clients.

Le serveur se retira, laissant les deux garçons de nouveau seuls. Byo écoutait attentivement ce que débitait son interlocuteur. Il était assez plaisant, certes, mais pas de là à être le meilleur des hosts. Pour le blond, c'était une évidence : il y avait plus beau que Kanon.

- J'm'en moque que tu m'aimes bien ou pas, j'suis pas là pour ça. Je veux ce job, déclara le junkie en se rapprochant de la table, et si le test est déjà terminé pourquoi ne pas le dire à Miyavi ?

Il sourit, fouilla dans ses poches pour en ressortir un paquet de cigarettes, dans lequel il n'en restait d'ailleurs pas beaucoup, et le posa sur la table. Il en prit une, l'alluma et en proposa une au brun en face de lui.

- T'as quel âge ? Tu ressembles à un gamin.

Oui, à un vrai gamin, aussi bien dans le comportement que dans le physique. Cela fit remarquer à Byo que c'était peut-être cette caractéristique là qui attirait drôlement les pervers. Dégueulasse, songea-t-il.

- T'aimes ça te faire mater par des porcs ? Ca m'intrigue, raconte-moi.

Il tira sur sa clope, attendant une réponse.

Byo se sentit totalement poignardé en plein cœur. Non pas à cause du refus de l'effronté lorsqu'il lui proposa une cigarette, mais par sa manière de dire que si Byo s'intéressait ou pas à lui, il n'en avait absolument rien à faire.
Il prit une immense inspiration, tira sur sa clope puis les boissons arrivèrent finalement. Le blond écrasa sa sucette mortelle et l'envoya plusieurs mètres devant lui.

- J'pense pas qu'on puisse s'entendre toi et moi, lâcha-t-il en le fixant dans les yeux, dépêche-toi de boire, je veux parler à ton patron.

La goutte avait fait déborder le vase et, une seule supplémentaire pourrait faire craquer le junkie. Il le sentait, tous ses muscles étaient en émoi, il avait besoin de frapper quelque chose, ou quelqu'un. De passer ses nerfs bien trop titillés tout au long de cette soirée. Il fallait qu'il songeât à autre chose, qu'il laissât Kanon et qu'il tapât pour se défouler.
D'un trait, il but la boisson posée devant lui et attendit son interlocuteur. Son cou lui parût alors tout à fait parfait, si jamais il l'ennuyait encore.
Si Byo portait une quelconque attention sur quelqu'un, alors en retour, ce quelqu'un devait se montrer intéressé. Or, Kanon avait enfreint cela et le blond conservait tant bien que mal son envie de lui dévisser la tête.

Le blondinet haussa les épaules, se releva à son tour, paya le patron du bar et fit chemin inverse pour retourner au Host Club. En chemin, pour décompresser encore, il fuma une deuxième cigarette. La soirée avait finalement été plus rapide que ce qu'il avait prévu ; et ce n'était pas plus mal.
Ce Kanon... Il retenait parfaitement son visage et son comportement exaspérant. A vingt ans, il se comportait comme un enfant de cinq ans, Byo trouvait cela très agaçant.
Il ne devait plus songer à lui désormais. Voilà le bâtiment qui se dessinait maintenant devant ses yeux. Il termina sa clope puis entra. Sans passer par l'accueil, il gravit les étages et toqua à la porte du bureau de Miyavi.
Passant une main dans ses cheveux, il respira une grande bouffée d'oxygène ; il se sentait un peu mieux désormais. Sans cet host, c'était le bonheur, ou presque. Il espérait que le poste que lui avait proposé le patron du Host Club soit le sien, car sinon, s'il avait tout cela pour rien... Sa colère partirait certainement très vite et sans retenue !