La nuit porte conseil, dit-on... ~ Ivy

Se tournant et se retournant de nombreuses fois dans son lit, un jeune rebelle d'une vingtaine d'années, ne parvenait pas à trouver le sommeil. Il songeait à son passé, il pensait à sa mère qui vieillissait, qui commençait à divaguer et à s'exclure de la réalité. Le blondinet s'assit et s'appuya sur le mur de son lit. Il tourna le visage afin de regarder par la fenêtre. Il paraissait être tard car il faisait très sombre à l'extérieur. Mao réussit à voir un croissant de la lune qui se cachait parmi les nuages et côtoyait de prés les quelques étoiles présentes. Le garçon soupira, se frotta les yeux et décida de se lever. Il ne prêta cependant pas attention à son radio réveil ; l'heure est quelque chose de tellement vague et de peu important au fond, qu'il s'en dispensait souvent.
Le blond enfila rapidement des vêtements aussi profonds que la nuit, se passa une main dans sa chevelure en bataille et qui ne revendiquait plus de réelle coiffure, avant de s'aventurer à l'extérieur. Il erra un long moment dans les rues, évitant tout de même les junkies qui étaient éparpillés çà et là puis il arriva vers le cimetière. Endroit extrêmement glauque de jour et davantage encore le soleil couché...
Hésitant, mais finalement décidé, Mao y pénétra, navigua entre les différentes tombes pour rejoindre celle de son père. Il s'agenouilla et fixa longuement le pot de fleurs fanés. En réalité, la personne qui reposait ici n'était pas le véritable père du garçon, c'était son père adoptif.
Le jeune homme ferma les paupières, aucun bruit ne vint briser ce silence mortel. Étrangement, Mao se sentait davantage en sécurité dans ce cimetière que dans son studio. Peut-être se considérait-il plus à l'instar de son paternel qu'à l'instar de sa mère...
Un léger vent le fit frissonner, il ouvrit alors les yeux et se releva. Plongeant ses mains dans ses poches, il demeura là, ne songeant à rien, le regard dans le vide. La fatigue ne l'envahissait toujours pas et il ne savait pas quoi faire de sa nuit. Il rebroussa malgré tout chemin, les pieds trainants, les iris dans le vague.
Mao s'arrêta tout à coup, sans raison précise, peut-être juste un léger bruit qu'il entendit. Quelques secondes, le blondinet ressembla à une girouette, épiant tout ce qui aurait pu provoqué ce bruit tout autour de lui.

« Il y a... quelqu'un ? » Murmura-t-il d'une voix mal assurée.

Il n'osait pas bouger, un sentiment de peur clouait ses pieds au sol. Cet endroit ne le protégeait plus réellement à cet instant. Il commença à se mordiller la lèvre inférieure et à courber la tête. Il se trouvait vraiment idiot de réagir de la sorte, mais ce n'était qu'un gamin...

Lorsque Mao eut une réponse et qu'il aperçut son interlocuteur, son corps se détendit et il s'autorisa un léger soupir de soulagement. Le blond rendit alors son sourire à l'autre avant de rire doucement :

« Vous m'avez fait peur ! »

Il enfonça ses mains dans son long manteau et regarda derrière lui. Il s'inclina un peu pour saluer son père et se retourna vers l'inconnu. Mao fit deux pas en avant avant de lui adresser un sourire. Il reprit la parole pour déclarer :

« Vous êtes venus voir quelqu'un ? »

En même temps, se promener dans un cimetière en pleine nuit n'était pas forcément une action commune. L'autre garçon ne paraissait pas trop méchant, seulement peut-être un peu étrange par son look. D'ailleurs, Mao pensait que c'était un homme, mais il n'en était pas entièrement certain.

Mao fut surpris de la réponse de son interlocuteur. Que faisait-il donc dans un cimetière en pleine nuit sinon pour venir se recueillir ? Piqué à vif malgré la froideur de la soirée, le blondinet se donna pour objectif d'en savoir un peu plus.

« Mon père, répondit-il en désignant la tombe derrière lui, ça faisait longtemps que je n'étais pas venu le voir... »

Il soupira avant de se ressaisir et d'adresser un large sourire à l'autre garçon.

« On fait quelques pas ensemble ? On gèle à rester sur place. »

Il se demanda alors si c'était un rebelle ou bien un junkie. Bien que Mao ne soit pas gêné plus que ça aux côtés des junkies, il préférait tout de même discuter avec des rebelles.
Cependant, il n'interrogea pas l'inconnu et ils marchèrent silencieusement vers la sortie du cimetière.

« Que faisiez-vous ici si vous n'êtes pas venu rendre une visite ? » Lâcha-t-il finalement en redoutant un peu la réponse.

Il espérait ne pas avoir mis l'autre en colère ; savait-on jamais qu'il soit violent...

D'abord surpris de la révélation de l'homme en face de lui puis hésitant sur la main tendue devant lui, Mao haussa les épaules. C'était vrai, l'autre, Ivy donc, ne paraissait pas réellement violent, ni même méchant ou alcoolique. Etrange d'ailleurs pour un junkie... Le blondinet trouvait son interlocuteur timide, réservé, perdu comme il l'avait bien signalé.
Répondant finalement à sa poignée de main, Mao se présenta à son tour :

« Moi c'est Mao, et puis bon, tu as du le remarquer, je suis un rebelle. »

En disant cela il offrit un très large sourire à l'autre garçon. Ils marchèrent tous les deux en silence durant un petit instant, puis le rebelle décida de reprendre la parole.

« Tu veux que je te raccompagne... ? Tu m'as dis que tu étais perdu. »

Il shoota dans un caillou.

« Pour un junkie, tu sembles vraiment différent. »

Ça le démangeait, il n'avait pas pu s'en empêcher. Après tout, il ne les craignait pas, il savait plus ou moins se défendre.

Mao rit en voyant les yeux ronds d'Ivy, puis il répondit :

« Si je propose de te raccompagner, c'est que tu ne me déranges pas. Disons que j'ai du mal à dormir ce soir... »

Il ne s'attarda pas davantage sur ce détail et reprit :

« Oui, tu es différent. Différent des autres junkies, tu as l'air... plus inoffensif que certains. »

Et le blond savait bien de quoi il parlait. Son interlocuteur semblait vraiment calme et posé, à le voir ainsi, on pourrait le prendre pour un rebelle. Mais peut-être cachait-il un tout autre caractère sous cette façade ? C'était pour cette raison que Mao demeurait quand même sur ses gardes, par pure protection évidemment.

« Le ciel est sombre aujourd'hui, ça me... »

Il trébucha sur une racine et manqua de s'étaler de tout son long. Heureusement, ses mains amortirent sa chute. Il les frotta l'une contre l'autre pour sortir les petits graviers collés. Il rit nerveusement et termina sa phrase :

« Ça me met le moral en l'air... Et cette foutue racine ! » Ajouta-t-il.

*Je m'excuse vraiment pour le temps de réponse, j'ai eu quelques soucis*

Mao prit la main d'Ivy et le remercia.

« Tu sais, un style ne fait pas tout non plus. »

Il lui sourit.

« Prendre un café ? Tu veux me tenir éveillé, c'est ça ? »

Mao rit un peu tandis qu'ils continuaient tout deux de marcher en direction de la sortie. Cette dernière ne tarda pas à se dessiner devant leur yeux. Le rebelle reprit :

« Mais je suis d'accord, de toute façon je n'ai pas envie de partir me coucher. Nous voilà dehors !» ajouta-t-il.

Avec amusement, Mao se courba et dit :

« Après vous, jeune homme. »

Mao répondit joyeusement au sourire de Ivy, mais fut étonné de sa deuxième phrase. Aller dormir alors qu'il venait de trouver quelqu'un avec qui discuter ? Hm, non certainement pas.
Tandis qu'ils s'éloignèrent du Sanctuaire de la liberté pour entrer dans le Land of decadence, Mao fit confiance à son interlocuteur afin de le conduire. Il ne connaissait pas très bien ce côté là, car il n'y allait pas souvent. En même temps, il n'aimait pas réellement les junkies. Non pas qu'il ne savait pas se défendre au cas où, mais s'il pouvait s'éviter des ennuis ça lui convenait parfaitement.
Finalement les deux garçons arrivèrent devant une résidence. Mao ignorait combien de temps ils avaient marché, au côté de Ivy et les yeux découvrant un nouveau lieu, il se moquait bien du temps de marche.

« Oui, avec plaisir ! »

Il se demandait bien à quoi pouvait ressembler l'habitation de son camarade...

Le blondinet se laissa conduire sans rien dire. Il regardait bien où on l'emmenait, car savait-on jamais... Lorsque la porte de l'appartement de son interlocuteur s'ouvrit, les yeux de Mao s'agrandir très largement. Tout était vraiment beau, blanc et spacieux. Il mit un moment avant de passer la porte, totalement ébahi par toute la lumière qui régnait ici. En comparaison à son propre studio, ce dernier paraissait bien lugubre. Sous le choc, on pouvait le dire, entre le contraste du fait qu'Ivy était un junkie (donc pour Mao cela signifiait le désordre, la saleté) et l'appartement complètement stylé, il n'en revenait pas toujours pas.
Enfin, il se secoua et décida d'entrer. A la suite de son camarade, il se déchaussa et le suivit jusqu'au salon - tout aussi beau que l'entrée. Il tendit son manteau en remerciant le garçon et ne se fit pas prier pour s'asseoir sur le canapé. Il eut un soupir de bien-être, ce canapé était drôlement confortable !
Alors Mao se mit à rêver, il voulait à tout prix un studio à l'instar de celui d'Ivy ! Il l'enviait sacrément.

« Boire... ? murmura-t-il, ah ! Euh... j'aimerais bien un café, bien fort si possible. »

Histoire de me remettre les idées dans le bon ordre, ajouta-t-il en son for intérieur. Il sourit très largement à son hôte et reprit la parole :

« Tu veux pas me donner ton studio ? On échange, d'acc' ? »

Il rit doucement. Évidemment il blaguait... quoique !
Mao continua ensuite sa contemplation, les jambes croisées et les yeux émerveillés. Même si on lui mettait une poche de bonbons entière devant lui, il la pousserait certainement pour mieux admirer le lieu dans lequel il avait été invité.

Mao fut surpris par ce que lui déclara Ivy. Il pourrait venir ici quand il le souhaiterait ? Waah... Ses yeux pétillaient de joie. Mais un seul ennui, il était un rebelle et ne venait guère se perdre de l'autre côté de la frontière. Il prit une moue boudeuse.

« C'est gentil, mais tu sais, c'est pas mon habitude de venir chez les junkies ! »

Il plaqua alors sa main sur sa bouche, remarquant qu'il venait de commettre une bêtise. Il avait bien dit clairement être un rebelle...
Il se tourna légèrement vers son interlocuteur, prit une des tasses qu'il tenait dans ses mains et but une longue gorgée, histoire de ne pas se faire poser de questions. Mao espérait que son camarade ne se mette pas à lui crier de sortir de chez lui... ou alors pire, lui faire du mal.
Il esquissa un léger sourire, mais non, Ivy ne paraissait pas comme ça. A vrai dire, le blondinet se rassurait du mieux qu'il le pouvait.

« J'aime beaucoup ton café, il est à la fois doux et fort. C'est agréable. »

Le blondinet offrit un large sourire à Ivy lorsque celui-ci lui assura qu'il ne lui ferait aucun mal. De plus, quand il reçut un bisou sur sa joue, il rougit un peu avant de s'exclamer :

« Merci de m'inviter à venir chez toi comme ça, alors qu'on ne se connaît à peine. Vraiment, je vais commencer à croire qu'il n'y a pas que des pourris dans ce monde... pourri ! rit-il, et puis, ton café est exquis, n'en doute pas. »

Pour confirmer ses dires, il termina de boire sa tasse, la déposa sur la table basse devant lui et s'enfonça un peu plus dans le canapé. Qu'est-ce que c'était agréable de se retrouver là, vraiment paisible, et étrangement ça l'était davantage que dans son propre appartement.
Mao esquissa un sourire, puis se tourna vers son ami et, avec un air malicieux, lorgna sur sa chevelure. Il n'avait pas encore envie de dormir, en revanche, il avait bien envie d'embêter un peu le jeune homme à côté de lui !
En deux temps trois mouvements, le rebelle se mit à chatouiller Ivy, puis il en profita également pour le décoiffer gentiment. C'était un peu sa vengeance, car l'autre lui avait volé un bisou !

Alors que Ivy était en train de, à son tour, le chatouiller, Mao riait à gorge déployée. Il craignait plutôt bien les chatouilles. Tellement il s'amusait, un hoquet vint le surprendre, ce qui le fit, évidemment, encore plus rigoler.
Puis tout à coup, il se releva d'un bond, fixa méchamment son nouvel ami. Il mit les mains sur ses hanches, fit un regard noir et déclara :

« Oui, tu devrais te méfier, je peux être très vil ! »

Mais pour toute confirmation, le rebelle pouffa, montrant ainsi que ce qu'il venait de dire s'avérait bel et bien faux !
Mao, être vil ? C'était bien une idée étrange que de penser cela. Il ne possédait pas de songes méchants, ou cruels, au contraire, mais si vraiment on l'énervait sa gentillesse et sa bonne humeur pouvait très bien se changer en mots déplaisants. Cependant, ça ne lui était pas arrivé depuis... longtemps, et il n'allait certainement pas s'en plaindre.
En tournant le visage, le blondinet remarqua une baie vitrée chez son hôte, ainsi qu'une terrasse. Il ouvrit de grands yeux et la désigna du doigt :

« Oh, Ivy-chou, je peux y aller ? »

Mao sourit largement à au junkie, il commençait à réellement bien l'apprécier et il ne se méfiait plus de lui. Après tout, il ne semblait vraiment pas mauvais, au contraire de certaines autres personnes... Au fond, tant mieux, cela permettait au blond de discuter tranquillement et de bien s'amuser.
Il se releva à son tour, remercier Ivy et eut un léger rire quand ce dernier l'appela également "Mao-chou".

« Ca te va mieux à toi, Ivy-chou ! »

Il le décoiffa gentiment, Mao adorait faire cela aux gens qu'il connaissait, ça l'amusait drôlement.
A la suite de son hôte, il arriva sur le balcon. L'air frais de cette soirée le fit frissonner, la lune brillait haute dans le ciel ; ce décor le ravissait et il en oubliait presque qu'il ne se trouvait pas sur son territoire.
Il s'approcha de la rambarde et s'y appuya, il respira un grand coup avant de parler de nouveau :

« Tu fais quoi comme métier pour avoir un appartement comme ça ? Moi je fais quelques boulots, par-ci par-là, je n'aime pas faire tout le temps la même chose. C'est sûr que pour vivre, c'est pas tous les jours faciles, et je dois aider ma mère souvent, mais tu vois, je suis heureux comme ça. »

D'un sourire sincère, il approuva ce qu'il venait de débiter. Oui, le jeune homme détestait rester sur la même chose trop longtemps, voilà pourquoi il changeait beaucoup de travail. Une fois il livrait de la nourriture et une semaine plus tard il pouvait très bien se retrouver à réparer des machines. Mao adorait le changement, mais pas trop non plus.

A l'entente du mot "prostitué", Mao se retourna et détailla son camarade. Comment pouvait-il faire ce métier alors qu'il ne semblait pas trop extraverti ? Le blondinet ne l'imaginait pas vraiment faisant son travail, c'était assez difficile à concevoir. Mais après tout, pourquoi pas...
Il sourit à son nouvel ami qui paraissait s'intéresser à la petite vie qu'il menait.

« Intéressante, pas vraiment, dit-il en esquissant une moue, tu sais je me mets un peu d'action ! Sinon ce serait drôlement monotone. Il faut que ça bouge avec moi, je veux pas rester sur la même chose trop longtemps. Et je n'ai pas de patience, du coup, si ça me gonfle, ça vole ! rit-il, tu aurais dû me voir il y a quelques mois de ça... Je faisais l'éboueur, c'était assez comique ! Ramasser des déchets et tout, ça sentait pas la rose ! »

Il rit doucement puis attrapa l'avant-bras de son interlocuteur pour le faire venir jusqu'à la rambarde. Il l'y entraina puis, une fois contre, le blondinet leva le visage puis montra la lune dans le ciel.

« Tu as vu, elle est belle hein ? J'adore la lumière qu'elle fait, c'est rassurant je trouve... »

Rassurant, pourquoi, parce que le garçon avait peur du noir. Le soir, il ne dormait jamais les volets fermés, ça non, il avait bien trop peur. Au fond, c'était idiot, car un monstre ne surgirait certainement pas de dessous son lit, mais voilà, il n'aimait pas trop ça, le noir complet.

« Dis... reprit-il d'une voix d'enfant, tu as peur de quelque chose toi ? »

Si Ivy lui révélait l'une de ses peurs, alors peut-être que Mao le ferait à son tour.